Fermeté et Miséricorde

L’Église - et le Vatican en particulier - a terminé l’année 2023 avec deux tollés : la condamnation du Cardinal Angelo Becciu à 5 années de prison ferme, l’ouverture à la bénédiction des couples « irréguliers ».  
C’est bien la faute au Pape : dans un cas il est trop strict, après il est trop laxiste…
Cependant, n’oublions pas que, si c’est bien le Pape qui donne le ton du fonctionnement du Vatican aujourd’hui, il est entouré de nombreux experts, compétents et bienveillants.
De plus, François et son équipe ont une vision sur l’Église à 360°, et ils doivent tenir compte des nombreuses sensibilités, tâche pas facile. Dans tous les cas, notre vision est bien plus limitée ...

Le cardinal Angelo Becciu (qui fut longtemps l’une des figures les plus en vue du Saint-Siège) a été condamné, samedi 16 décembre, à cinq ans et demi de prison par le tribunal de la cité du Vatican. Il ne pourra plus occuper de charge publique. Le prélat comparaissait, aux côtés de neuf autres personnes, dans une affaire d’investissements financiers douteux qui se sont révélés catastrophiques pour le plus petit État du monde.

C’est la première fois qu’un cardinal est jugé par des laïcs au sein même du Vatican. La procédure elle-même, voulue particulièrement transparente avec des audiences ouvertes à la presse est, elle aussi, inédite.
L’impunité, de laquelle a bénéficié le clergé depuis des siècles, est remise en cause avec grand étonnement des cadres de l’Église, en particulier du personnel du Vatican. François & Co. sont en train de bien secouer le cocotier...

L'excellent document du Dicastère pour la Doctrine de la Foi Fiducia supplicans, consacré à la signification pastorale des bénédictions, en particulier celles concernant les couples en situation irrégulière et les couples de même sexe, a reçu des réactions mitigées.
Or la foi chrétienne, lorsqu’elle se contraint dans un moralisme rigide, représente un contre-témoignage mortel à la joie de l'Évangile et conduit nécessairement à une vision élitiste du christianisme, qui se retrouve ainsi dégradé au rang de secte des parfaits.
Le document est clair : dans aucun cas nous ne pouvons assimiler ces unions à des mariages chrétiens. Les bénédictions « particulières » seront pratiquées hors de toute célébration, sans aucun signe extérieur (notamment les vêtements...) qui puisse faire penser au mariage.
Dans un même temps, le document affirme de manière cohérente la primauté du « principe pastoral », orienté vers la pratique de la miséricorde, compris non seulement comme une vertu spirituelle parmi d'autres, mais comme une véritable « architrave » de l'identité et de la mission de l'Église dans son complexe.
Le principe pastoral, comme l'enseignent la lettre et la méthode du Concile Vatican II, n'abolit pas la doctrine, mais la réinterprète à la lumière de l'expérience concrète, évitant ainsi qu'elle ne dégénère en une « langue morte », comme c'est parfois le cas aujourd'hui.
Il faut bien comprendre ce qui est souligné au paragraphe 12 de Fiducia supplicans, où l'on met en garde contre le risque « d'exiger, pour une simple bénédiction, les mêmes conditions morales qui sont demandées pour la réception des sacrements. (…)  En effet, le danger existe qu'un geste pastoral, si aimé et si répandu, soit soumis à trop de conditions morales préalables qui, sous prétexte de contrôle, pourraient obscurcir la force inconditionnelle de l'amour de Dieu sur lequel se fonde le geste de la bénédiction. »

Bref - pour le dire clairement avec les mots d’un de mes compatriotes : « pendant des siècles, nous avons même béni les armes et les armées ; nous ne comprenons pas pourquoi nous devrions refuser une bénédiction à ceux qui, au milieu des joies et des difficultés, essaient au moins de s'aimer les uns les autres. »  Père Mario